Dès l’antiquité1, les hommes ont toujours utilisé la musculation pour développer leur potentiel physique, améliorer leurs performances et être en meilleure santé. La musculation dans les sports de combats ne date donc pas d’hier.

Dans l’imaginaire collectif d’aujourd’hui, la musculation est souvent associée au domaine de la guerre ou du combat. Pour s’en convaincre, on peut constater l’effervescence d’un marketing qui associe spartiates et guerriers en tout genre avec le milieu de la remise en forme.

Nous verrons dans cet article, le lien objectif qu’il peut y avoir entre la musculation et les sports de combat. Mais aussi, comment coupler au mieux les deux activités pour être plus performant.

1. Comment conjuguer sport de combat et musculation ?

A. 3 paramètres essentiels pour la performance d’un combattant

1. L’habileté technico-tactique

Cela regroupe le panel technique, les stratégies de combat et la capacité à s’adapter à l’incertitude des mouvements de l’adversaire notamment. Ce paramètre doit constamment rester le centre de préoccupation du combattant. Son amélioration est quasiment infinie, du fait des nombreuses combinaisons techniques et les stratégies possibles en fonction de l’adversaire.

2. La condition physique

Cela englobe les différentes qualités nécessaires à la réalisation technico-tactique, à savoir : La force physique, l’endurance, la vitesse gestuelle, la souplesse etc… Toutes ces qualités prennent une place plus ou moins importante en fonction de son sport de combat. La souplesse par exemple, occupera une place plus importante en Tawekwondo. A contrario, l’endurance aérobie sera davantage requise en boxe anglaise de part la durée des matchs. De même, au sein d’une catégorie de poids c’est la force rapportée au poids de corps (force relative) qui va être la plus déterminante.

 

3. Le poids de corps

La quasi-totalité des sports de combat pratiqués sous forme compétitive classent les athlètes par catégorie de poids. La raison principale c’est que pour un même niveau d’habileté technico-tactique, le poids de corps va être un avantage essentiel pour la performance. Les combattants les plus légers sont désavantagés. Leur force absolue étant souvent plus faible de part leur plus faible masse musculaire (voir l’article sur la force en musculation).

Et plus la catégorie sera lourde, plus la force physique risque de prendre une place prépondérante dans la performance. De ce fait, la préparation physique des athlètes doit forcément en tenir compte. C’est pour cela qu’en fonction de la catégorie de poids et des besoins de chaque athlète, on ne peut pas prescrire un même programme d’entraînement pour tous.

On peut souvent entendre qu’un manque de technique peut être compensé par une meilleure condition physique mais seulement jusqu’à un certain niveau. Il est difficile de dire précisément la part respective de chacun des 3 paramètres de la performance physique.

Attention cependant, la plupart des combattants professionnels sont souvent tous en bonne condition physique et proche de la limite maximale autorisée par leur catégorie de poids. Ce qui fait donc souvent la différence, c’est l’habileté technico-tactique du combattant.

Ce qui est sûr. c’est qu’être le plus lourd et le plus fort physiquement ne fait pas tout, un exemple en Lutte et en MMA : 

Exemple en Lutte

Exemple en MMA

B. Ne pas courir deux lièvres à la fois

La musculation et plus généralement le conditionnement physique représentent donc seulement une partie de l’entraînement pour les sports de combat. La fréquence idéale pour la majorité des pratiquants qui souhaitent progresser en musculation se situent entre 3 et 5 séances hebdomadaires (voir l’article sur la fréquence d’entraînement idéale en musculation).

Afin de pouvoir coupler l’entraînement de musculation et son sport favori, tout en progressant dans les deux activités, il faut comprendre que tout est une histoire de compromis et qu’on ne doit pas « courir deux lièvres à la fois ».

Cela peut même devenir contre-productif de faire trop de musculation car le plus important est d’être en forme pour pouvoir forcer suffisamment durant ces entraînements dédiés à son sport. De même, pour améliorer les nombreuses qualités physiques, la musculation seule risque de ne pas suffire.

Mais plutôt que réaliser un seul type d’entraînement pour être fort, musclé, endurant et rapide à la fois, il convient de séparer l’entraînement des différentes qualités. La force pourra être entraînée au cours des séances de musculation, l’endurance et la souplesse feront elles aussi l’objet de séances dédiées, tout comme les entraînements spécifiques pour son sport de combat.

Il faut donc réorganiser son planning d’entraînement et faire des choix. En musculation, cela passe inévitablement par des entraînements avec moins de séances et moins d’exercices. Il faut donc privilégier la qualité avant la quantité pour ne pas s’épuiser, risquer la blessure et être sûr de stagner partout.

2. Comment s’entraîner en fonction des spécificités de son sport ?

A. Les différents types de sports de combat

Tous les sports de combat peuvent se diviser en deux catégories. Les sports de préhension, où l’on combat sans porter de frappes comme par exemple la Lutte, le Grappling ou le Judo. Et les sports de percussions tel que la Boxe anglaise, le Karaté, ou le Kickboxing. On peut ajouter une autre catégorie qui mixe à la fois la percussion et la préhension comme c’est le cas en MMA, Sanda, Kempo etc…

B. Quel type d’entraînement réaliser en fonction de son type de sport de combat ?

Quand il s’agit de réaliser son plan d’entraînement, on peut croire instinctivement qu’il faut absolument reproduire des gestes proches de sa discipline. Par exemple pour les sports de combat de préhension, travailler davantage de mouvements de tirage : les tirages horizontaux et verticaux. Et privilégier les mouvements avec une poussée vers l’avant pour les sports de percussion.

Pour ma part, je pense que cette vision reste trop simpliste. La première chose à faire pour donner un coup de poing efficace ou amener son adversaire au sol, c’est de savoir réaliser techniquement le geste sportif et ça, aucun mouvement de musculation ne peut y aider!

 

 

On s’expose même à un risque plus important de blessures.

Exemple concret : En travaillant lors de tous ses entraînements des mouvements avec projection du bras vers l’avant, sans chercher à équilibrer avec un travail des muscles du dos, cela va engendrer un renfermement de la posture en avant, augmentant le risque de blessures aux épaules.

Il convient donc de privilégier un développement équivalent entre les muscles agonistes et antagonistes sans forcément chercher à reproduire absolument le même geste sportif. En revanche, il est possible d’insister de manière spécifique sur certaines groupes musculaires habituellement peu travaillées comme le cou, la force de préhension ou les abdominaux.

 

C. Comment planifier sa saison

La part de l’entraînement des différentes qualités physiques et des habiletés technico-tactiques va surtout dépendre de l’éloignement de la prochaine échéance sportive.

Si la compétition est éloignée, l’attention portée au conditionnement physique (force, endurance) peut être plus importante. Cette phase est souvent appelée préparation physique générale (PPG)2. Durant cette période, le nombre de séances de musculation va être plus important. Progressivement, à l’approche des compétitions, il va diminuer au profit des séances plus spécifiques (entraînement des habiletés technico-tactiques), dans le but d’atteindre son pic de forme le jour voulu. Il est même possible d’inclure des mouvements ou des modes de contraction se rapprochant davantage de la discipline à l’approche des compétitions (de la pliométrie par exemple).

Attention cependant, à ne pas totalement supprimer les entraînements de musculation plus traditionnel. Le risque est de perdre ce qui a été précédemment construit. La manière pour emmener l’athlète à performer reste donc de planifier le travail des qualités physiques en fonction de la période de l’année. Cette planification doit également tenir compte des besoins de l’athlète. 

 

3. Pourquoi ne pas s’entraîner comme les pros ou utiliser seulement des mouvements spécifiques ?

A. Le circuit training : La solution miracle ?

De nombreuses méthodes reviennent fréquemment sur le devant de la scène dans la préparation physique d’athlètes avec souvent l’entraînements sous forme de « circuits ».

Bien qu’il peut être intéressant, car les exercices employés se rapprochent souvent de la discipline, baser son conditionnement physique exclusivement sur un travail en circuit ne permettra pas d’améliorer de manière optimale des qualités comme la force ou l’endurance3, sur le long terme.

 

B. Pourquoi voit-on beaucoup d’entraînement non conventionnel :

Quand on regarde les vidéos des combattants professionnels à l’entraînement, on a l’impression qu’une nouvelle méthode originale émerge à chaque fois. Pourtant, les entraînements que l’on peut voir sur internet ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Les professionnels s’entraînent quotidiennement et pour sortir de leur routine de travail, captiver le spectateur qui les regarde et vendre des tickets pour vivre de leur sport, les combattants s’entraînent en plus de leurs entraînements, de manière non conventionnelle.

Les des avantages de pratiquer de nouveaux mouvements, c’est que cela permet d’apprendre de nouveaux gestes sportifs et de ce fait développe le panel de réponses motrices, dans le but d’être toujours plus à l’aise avec les mouvements de son corps mais cela ne représente pas le cœur de l’entraînement.

Si il le souhaite, il est tout à fait possible pour le pratiquant amateur, d’inclure des entraînements supplémentaires à son entraînement traditionnel, tant que cela n’entrave pas sa capacité de récupération et que cela lui permet d’être plus à l’aise avec sa gestuelle corporelle.

On peut citer par exemple le combattant professionnel de MMA Georges Saint pierre, qui durant sa carrière de combattant pratiquait de la gymnastique pour compléter ses entraînements.

En résumé

-Les habiletés technico-tactique, la condition physique et le poids de corps sont les principaux éléments qui vont influer sur les performances d’un combattant. Pour progresser, il faut donc faire des compromis pour que son entraînement de musculation soit au service de la performance et non pas une fin en soi en acceptant que la progression physique soit plus lente que si on s’y consacrait pleinement. En planifiant et en séparant l’entraînement des différentes qualités physiques on s’assure une progression plus lente mais continue.

-On peut classer les sports de combat en deux catégories : sports de préhension ou de percussion. Quel que soit la discipline, l’entraînement en circuit ou l’entraînement spécifique qui mime l’activité sportive doit s’inclure avec précaution. Reproduire des dérivés des mouvements de la discipline pour travailler sa condition physique peut être préjudiciable à l’athlète si l’équilibre des muscles agonistes et antagonistes n’est pas respecté. Il convient également de tenir compte des besoins spécifiques de chaque athlète en fonction de leur discipline, de leur catégorie de poids et de leur morphologie. 

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Notes de bas de page

 

1 Voir : Une pratique pour la santé dès l’antiquité : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4263393/

Une aide pour la performance dans l’antiquité : http://physicalculturestudy.com/2014/10/24/fitness-in-the-classical-age/ – https://physicalculturestudy.com/2015/01/19/halteres-the-dumbbell-of-ancient-greece/

L.P.Matveiev, « Les base de l’entraînement », 1980.

Leonid Matveyev introduisit pour la première fois la notion de périodisation pour décrire des phases d’entraînement qui, au cours de l’année, visait à atteindre des objectifs physiologiques particuliers.