Le Squat est un mouvement qui a été popularisé durant le 20ème siècle en Allemagne par Henri Steinborn, puis aux Etats-Unis en 1921 où il popularise le mouvement par des démonstrations de force et de détente ce qui lui vaudra le surnom de « Milo » en hommage au célèbre Milon de Crotone. Le mouvement entrera officiellement dans une compétition en 1971 durant le premier championnat du monde de powerlifting aux Etats-Unis sous l’égide de l’international weighlifting fédération.

1. Quelles sont les blessures fréquentes au squat?

Le squat fait partie intégrante de la préparation physique dans quasiment tous les sports qui requièrent de la force dans la zone du bas du corps. Certains sports considèrent le mouvement comme une compétition à part entière. C’est le cas notamment en Powerlifting (force athlétique), mais aussi en Crossfit. Bien que les blessures se produisent peu dans les sports de force, 3,3/1000 heures de pratique en Haltérophilie et 4,4/1000 en Powerlifting.

Lorsqu’elles surviennent elles peuvent être handicapantes.Le squat est l’un des mouvements où les athlètes déclarent le plus de blessures1De manière générale en musculation, les deux régions les plus lésées sur le bas du corps restent le bas du dos (zone lombaire) et les genoux2, 3.

On peut constater sur la vue de profil, que la colonne vertébrale saine présente trois courbures « mobiles » et déformables en vue de profil (illustration 1). Elles sont naturelles et dites physiologiques. La courbure lombaire serait apparue au cours de l’évolution de l’espèce humaine, résultant de la maîtrise de la station debout puis de la marche, donc avec le passage de la quadrupédie à la bipédie4

Dans la population générale les douleurs au dos sont l‘une des causes les plus courantes de consultations médicales et d’arrêt de travail. Elles sont mêmes associées à des risques accrus de dépression5.Voir le lien entre la dépression et les maux de dos :
https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0091217420913001
Le sport et de manière générale le mouvement, constituent des moyens recommandés pour lutter contre le mal de dos. Si effectivement l’activité physique permet d’améliorer les douleurs de dos, tout va dépendre de comment et à quelle intensité cette activité physique est pratiquée.

En témoigne les douleurs bien plus importantes chez les sportifs de haut niveau que dans le reste de la population6.  Les douleurs chez les sportifs de haut niveau :
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5491135/

2. Qu’est-ce qui influence l’apparition des blessures?

 

A. l’inclinaison du buste

Porter une charge sur le dos tasse les vertèbres et cela indépendamment de notre morphologie, mais cela n’est pas problématiquement quand on se tient droit pendant un court moment puisque les forces de compression sur les vertèbres lombaires ne sont pas trop importantes au regard de ce que la colonne vertébrale peut supporter. Pour constater le tassement, il suffit de porter une lourde charge sur le dos et d’observer que l’on est plus petit avec.

Durant le mouvement, avoir une bonne posture et de bons placements diminue grandement les forces de cisaillement par rapport à un dos rond, mais ne les supprime pas pour autant. Et plus on incline le buste en avant (même en étant correctement placé) et plus les forces de cisaillement augmentent. Lors de l’exécution d’un demi-squat l’étude de Cappozzo Aurelio7 estime la force de compression au niveau des vertèbres L3/L4 estimée entre 6 et 10 fois le poids du corps de l’individu. En outre, elle confirme l’évidence que plus le buste penche en avant durant l’exercice et plus la tension sur la zone lombaire est importante.

Pour limiter les tensions sur le dos le buste doit être le plus vertical possible. Pour cela, il convient d’améliorer sa souplesse de cheville ou d’utiliser des chaussures avec les talons surélevés. L’objectif étant d’avancer davantage les genoux pour permettre au buste de se redresser à la verticale et d’engager encore plus les quadriceps dans le mouvement.

Chaussures d’haltérophilie permettant de garder le buste plus vertical

Malgré toutes ces améliorations et recommandations, il se peut que l’on arrive toujours pas à squatter correctement et ce, en dépit d’un entraînement acharné.

Au squat si vous ne parvenez pas à garder une position correcte avec la barre à vide, il y a peu de chance qu’avec une barre chargée cela vous fasse du bien sur le long terme. Le plus souvent on découvre si l’exercice nous correspond vraiment lorsque on commence à forcer réellement dessus (avec l’augmentation de l’intensité de travail) mais pourquoi ? Tout simplement parce qu’avec une charge sur ses épaules, on remonte notre centre de gravité et donc, qu’il faut nécessairement pencher davantage le buste en avant pour conserver son équilibre.

Une autre explication réside dans notre constitution osseuse. Comme toutes les disciplines sportives, la morphologie osseuse influence les capacités physiques d’un athlète. Le plus souvent, nous ne sommes pas symétriques. Nous avons par exemple une jambe plus longue que l’autre, mais cela a rarement (si ce n’est pas exagéré) un impact négatif pour le mouvement du squat.

B. La longueur des fémurs

En revanche, si la longueur des fémurs est importante, que le buste est relativement court et que les chevilles sont plutôt raides alors le mouvement du Squat augmentera les risques de blessures car le pratiquant aura tendance à pencher le buste en avant.

Le buste s’incline davantage en avant avec une personne qui a de longs fémurs (représentation sur le personnage de droite)

Des lésions aux ménisques peuvent également survenir si l’on remonte en rentrant les genoux vers l’intérieur. Cela peut être causé par un manque d’activation des petits et moyens fessiers mais aussi parfois par un « Genu-valgum ».

Ne jamais rentrer les genoux vers l’intérieur

3. Les bons placements de base au squat

Il existe des positionnements différents qui sont en fait dépendants des morphologies de chaque individu. En revanche, on peut noter des constantes à respecter pour que le mouvement soit plus sécuritaire. Il est nécessaire d’adopter une technique rigoureuse dans le cadre d’un plan d’entraînement adapté au mouvement. La faute technique ne pardonne pas et peut vite conduire à de lourdes blessures invalidantes. Chaque mouvement s’apprend. Cela peut parfois prendre du temps pour que la technique ou autrement dit « l’apprentissage moteur » se fasse. s’améliore (L’apprentissage moteur est un ensemble de processus cognitivo-moteurs associés à la pratique et l’expérience qui conduisent à des changements relativement permanents au niveau de la performance des habiletés motrices ». (Voir Schmidt, R.A. « Motor Control and Learning ». 1988).

A. La position des mains sur la barre

La position des mains va être déterminante afin de maintenir la charge et fixer le dos pour que ce dernier ne bouge pas et permette de rester équilibré durant tout le mouvement. Plus les épaules seront étroites et moins il sera nécessaire de prendre large. A noter que plus on resserre la prise de main et plus la pression exercée sur les poignets sera importante. Il est également conseillé d’encercler la barre avec le pouce pour éviter qu’elle ne glisse dans le dos.

B. La position de la barre sur le corps

Positionner la barre au milieu du corps pour ne pas être en déséquilibre. Il existe 2 positions pour le squat arrière. La première dite «barre haute». La barre va reposer sur les trapèzes supérieurs qui vont former un coussin stable et moelleux permettant à la barre de ne jamais toucher la colonne vertébrale. La position du buste sera relativement redressée, diminuant ainsi l’engagement de la chaîne postérieure. La position barre «basse» fait que la barre repose sur les trapèzes moyens et les deltoïdes postérieurs. La position permet de réduire le levier vertébral et souvent de soulever plus lourd mais diminue l’effort des quadriceps dans le mouvement. Attention cependant, le buste sera plus penché en avant que sur le squat barre haute.

Position de la barre en position de squat « barre haute » à gauche et « barre basse » à droite 

 

C. La position de la tête

Le regard va souvent guider la position de la tête et de l’ensemble de la colonne. Pour débuter, il est conseillé de fixer un point en face de soi. Par la suite, le regard peut être positionné plus ou moins bas. La tête elle, doit rester immobile durant le mouvement. Attention à ne pas la lever excessivement car l’hyperextension risque de causer des douleurs dans la zone des cervicales à la longue. De même, attention à ne pas non plus baisser excessivement la tête, cela favoriserait l’arrondissement du dos.

 

 

D. La position du dos

La position du dos varie en inclinaison si l’on squatte en barre « haute » ou « basse » ou même en « squat avant ». Néanmoins, il faut toujours garder la courbure lombaire la plus droite possible en plaçant le bassin en légère antéversion et ce durant tout le mouvement. Placer le dos de la sorte va limiter les contraintes de cisaillement c’est à dire la pression exercée sur la colonne vertébrale.

 

 

Le dos doit être aligné et la tête redressée

E. La position des genoux et des pieds

La position des genoux va être d’une importance capitale pour leurs longévités. Bien que leur position va varier en fonction de la largeur de pied utilisées durant le mouvement, il faut chercher à aligner à la verticale les pieds les genoux lors de la remontée. Ainsi, les contraintes exercées seront moindres sur les ménisques et le poids sera réparti de manière optimale. Une des erreurs fréquentes consiste à rentrer les genoux lorsque l’on remonte causant une usure prématurée des ménisques internes et des hanches.

Les genoux ne doivent jamais rentrer vers l’intérieur

Concernant les pieds, il faut plus ou moins écarter les pointes de pieds sur le côté. Le but est d’aligner la position avec la direction de la rotule pour que le mouvement soit dans un axe naturel. La position des pieds va avoir un impact direct sur la préservation des ménisques.

Espacer les pieds entre eux permet de diminuer la distance à parcourir pour amener les hanches à l’horizontal avec les genoux s’en trouve réduite et donc il faudra réaliser moins de flexion pour atteindre un même point. De cette façon, le buste va se retrouver légèrement redressé, mais la sollicitation des adducteurs va être plus importante. A noter également, que la position avec les pieds resserrés va accentuer l’avancement des genoux et sollicite plus fortement les quadriceps.

Les pointes de pieds sont plus ou moins vers l’extérieur pour préserver les genoux

F. Répartition du poids sous les appuis

La répartition du poids va être déterminante dans la bonne exécution du mouvement. Si le poids est majoritairement réparti vers l’avant au niveau des pointes de pieds, alors les talons risquent de se décoller. A cause de cela, le dos peut s’arrondir ou de s’incliner fortement vers l’avant pour compenser et empêcher que l’on tomber. Cela risque d’engendrer une usure prématurée des disques intervertébraux.

Il faut donc chercher à répartir le poids de manière équitable entre l’avant et l’arrière du pied.

Répartition du poids trop en avant

G. La respiration

Une fois en position de squat, avec la barre, afin de préserver un maximum la colonne vertébrale, il faut prendre une inspiration avant d’amorcer la descente et bloquer la respiration (manœuvre de Valsava). L’objectif va être d’augmenter la pression intrabdominale pour rendre le torse le plus rigide possible et donc moins déformable. Il est possible d’expirer en remontant la barre.

H. La flexion et l’extension des jambes

La barre doit se situer dans ce que l’on appelle « le couloir de barre » durant la flexion et l’extension afin que le squatteur reste en équilibre. Autrement dit lorsqu’on regarde le squatteur de profil la barre doit se situer dans un couloir formé entre la ligne des pointes de pieds et les talons. C’est la position idéale pour appliquer un maximum de force à la verticale et remonter.

La barre doit rester dans le couloir situé entre les talons et les pointes de pieds en vue de profil

Le dos doit rester fixé plat (en légère antéversion) pendant tout le mouvement.

Lors de l’extension on note un passage difficile situé dans la montée à environ 30° au dessus de la parallèle pour les fémurs. Durant ce passage, la barre peut légèrement sortir de son couloir en avançant. Dans cette position les quadriceps vont être partiellement désengagés. Afin de faciliter le passage, les genoux devront s’avancer vers l’avant ce qui permettra de réengager les quadriceps dans l’effort.

Illustration du passage critique par un réengagement des genoux vers l’avant pour réengager les quadriceps dans l’effort (point 4)

I. La bonne amplitude

Il existe de nombreux débats sur la bonne amplitude à adopter pour réaliser un Squat. En réalité, peu de personnes ont le profil pour réaliser un Squat avec une charge sur le dos en très grande amplitude8. Mais plus le genou est fléchi et plus l’activation musculaire des Quadriceps est importante9Pour optimiser les bénéfices du mouvement et limiter les risques, descendre à la parallèle au sol semble être un bon compromis10. Mais cela n’est pas une règle établie, il faut bien sûr adapter son mouvement à ses possibilités.

4. Comment faire si le mouvement ne développe pas mes cuisses ?

Si notre morphologie et notre technique sont bonnes, le recrutement des quadriceps aura tendance à prendre l’ascendant sur les autres muscles. En revanche, si l’on incline le buste en avant durant le mouvement, c’est la zone lombaire, les fessiers, les ischio-jambiers et toute la chaîne postérieure qui sera préférentiellement activée durant l’effort. Les quadriceps seront en flexion moins prononcés et l’exercice ne permettra pas de les travailler suffisamment.

Il convient donc de ne pas s’entêter et changer d’exercice si l’on souhaite travailler ses quadriceps.

Squatter avec une barre le « cul par terre » n’est pas possible pour tout le monde. Si vous vous retrouvez dans le cas où vos fémurs sont longs proportionnellement à votre buste, ou si vous souhaitez accentuer le travail des quadriceps, il est tout à fait possible de ne pas faire de squat avec la barre derrière le corps.

Les versions de squat avec la barre positionnée à l’avant comme le squat avant à la barre, à l’haltère, les machines comme le hack squat ou les presses circulaires seront préférables pour muscler efficacement ces quadriceps avec une contrainte réduite sur le dos. Le constat de ces appareils, c’est qu’en diminuant les contraintes exercées sur le dos ils reportent une partie des forces de cisaillement sur les genoux11. Mais cela n’est pas forcément néfaste, d’autant plus que l’on a des fémurs proportionnellement courts par rapport au buste.

L’hyperflexion des genoux est courante en haltérophilie 

Il est possible de ne réaliser que des exercices d’isolation mais la tension trop faible d’un point de vue musculaire risque de ne pas être suffisante pour développer ses cuisses. Un bon compromis pour diminuer encore plus les risques de blessures au genou et en même temps dans la zone lombaire tout en utilisant un exercice polyarticulaire reste le « Belt Squat » 

Machine de Belt Squat

En plaçant la charge au niveau des hanches, les tensions exercées sur le bas du dos sont nulles. De plus, comme il est possible d’incliner le buste en avant sans danger, les genoux peuvent être moins fléchis ce qui diminue également les tensions sur la zone. Si le mouvement du squat n’est pas fait pour vous, ne le faîtes pas, il n’est pas obligatoire dans le cadre de la pratique de la musculation.

En résumé

Donc, même si le mouvement améliore la force des muscles de la zone lombaire, cela ne l’empêche pas de potentiellement tasser et abîmer les disques et les articulations. D’où l’intérêt de réaliser des exercices de décompressions et des étirements après chaque séance où l’on tasse sa colonne vertébrale.

Le squat est un mouvement où les athlètes déclarent le plus de blessures même si elles ne sont pas si fréquentes que ça. Il convient de le pratiquer intelligemment et avec parcimonie pour progresser.

Le mouvement peut être néfaste à la longue si notre morphologie n’y est pas adaptée. Le Belt Squat est la version la moins traumatisante car aucune contrainte n’est exercée sur le dos. Les athlètes désireux de travailler leurs jambes sans mettre de charge sur leur dos, trouverons le meilleur compromis avec cet appareil. De même les athlètes de force peuvent tout à fait augmenter leur volume de travail des membres inférieurs avec cet outil. 

Quand on souhaite durer dans notre activité il est nécessaire d’adopter une technique rigoureuse dans le cadre d’un plan d’entraînement adapté et d’ajuster son amplitude à ses possibilités et non pas à une pseudo norme universelle qui n’existe pas.

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